Un sentiment d’appartenance
Prem Rawat :
Nous sommes là, avec comme thème un sujet incroyable, car, lorsqu’il est question de l’appartenance, c’est un sujet extrêmement important pour nous, les êtres humains. Dans ce monde, dès que nous sommes enfants, nous avons ce besoin d’appartenir à la famille, celle dans laquelle nous vivons, car, sans ce sentiment d’appartenance, toutes les petites disputes qui peuvent arriver avec d’autres membres de la famille n’auraient aucun sens !
En grandissant, nous élargissons notre cercle, peut-être celui de nos amis, mais nous éprouvons toujours ce besoin d’appartenance, parce que sinon, nous nous sentons comme des étrangers.
Lorsque nous trouvons du travail, nous avons besoin de sentir que nous avons notre place, besoin d’appartenir à cet environnement, d’appartenir au cercle des collègues.
Alors, qu’est-ce que cette “appartenance” ? Pourquoi en avons-nous besoin ? En tant qu’êtres humains, à quoi devrions-nous réellement appartenir, qui nous aiderait à être qui nous sommes ? Quel serait cet environnement ?
Hier, dès mon arrivée j’ai aussitôt regardé mon téléphone car j’avais un appel : « Un journaliste veut vous poser dix questions, voulez-vous y répondre ? » J’ai regardé les questions et elles traitaient des symptômes. « Pourquoi est-ce comme ceci ? Pourquoi est-ce comme cela ? Que va-t-il se passer pour ceci, que va-t-il se passer pour cela ? »
J’ai répondu à tout et ensuite j’y ai repensé et je me suis dit : « Pourquoi nous intéressons-nous à ce qui est arrivé, mais pas à la cause qui les a fait arriver ? » Nous assistons à une guerre et nous disons : « c’est horrible, c’est terrible ! » Mais nous ne considérons pas la cause de cette guerre, pourquoi échouons-nous systématiquement à tirer les leçons de l’histoire ? Pourquoi échouons-nous encore et encore à comprendre que ce sont nos actes ?
Et considérez ceci : 16 millions et demi de personnes déplacées, j’ai lu les gros titres et c’est très triste, très inquiétant ! Je sais que ce n’est pas la faute des ananas, ils sont peut-être responsables d’autre chose, mais pas de ça. Ce n’est pas la faute des tomates, en fait, je peux dire en toute certitude que les dauphins, les baleines, et même les crocodiles, plutôt méchants, ne sont pas responsables du déplacement de 16 millions et demi de personnes !
« Hum ! Ce n’est pas les raisins, ni les ananas, ni les baleines, ni les dauphins. Je me demande bien qui est-ce ? » Un vampire ? Ça me rappelle cette blague. Une nuit, deux bonnes sœurs marchent sur une route très sombre, un vampire surgit devant elles et leur montre ses crocs et ses yeux rouges…
L’une d’elles se tourne vers l’autre et lui dit : « sœur Margareth, sœur Margareth, montre ta croix, montre ta croix ! » Et sœur Margareth hausse la voix et dit : « Dégage ! »
On a une attente et il se passe autre chose, tout le monde est déconcerté. C’est comme si le monde entier était déconcerté, « Hein ! Comment est-ce arrivé ? » Faites donc une liste. À votre avis, qui est responsable ? Les ananas ? les raisins ? les moineaux ? les aigles ? les faucons ? les petits hommes verts ? enfin, qui ? La réponse va peut-être vous surprendre : « C’est nous, nous sommes responsables, c’est nous qui l’avons fait ! »
Beaucoup de gens ici se disent : « Non, je n’ai rien à voir avec ça. » Beaucoup de gens adoptent cette attitude et je comprends pourquoi ! Parce que nous ressentons un grand besoin de nous justifier, indépendamment des circonstances, nous éprouvons le besoin de nous justifier. Quand un policier nous arrête et nous dit : « vous avez fait un excès de vitesse », notre première réaction est de dire : « non ! »
Un policier m’a arrêté une fois il y a longtemps et il m’a dit : « vous avez fait un excès de vitesse », j’ai répondu : « je sais. » Parce que c’était le cas ! Ça l’a surpris, il m’a regardé… et le plus beau, c’est que je n’ai pas eu de contravention !
Mais nous voulons nous justifier, nous ne voulons pas prendre la responsabilité de tout ce qui se passe dans le monde. « Mais comment ça pourrait être moi ? Qu’est-ce que je peux y faire ? » Alors, arrêtons-nous, et laissez-moi vous poser cette question : « Qui êtes-vous ? »
En entrant dans une pièce sombre, très sombre, je dis : « Mon Dieu, il fait très sombre ici, je n’y vois rien, c’est vraiment très sombre », et l’ampoule me répond : « Je n’y suis pour rien. » Qu’est-ce que je laisse entendre ici ? Seriez-vous une ampoule ? Peut-être avez-vous le pouvoir de repousser l’obscurité et vous ne le réalisez pas ? Tout ce que vous avez à faire, c’est de briller un peu.
Vous pourriez répondre : « qu’est-ce que ça va changer ? » D’accord, voici une analogie. Si vous possédez une lampe, une de ces vieilles lanternes avec une mèche et de l’huile. Si vous avez une lampe ou bien une bougie, c’est plus facile à imaginer, une de ces longues bougies, vous en avez une éteinte et une autre allumée. D’accord ? Donc, une bougie éteinte et une bougie allumée.
Vous approchez la bougie allumée de la bougie éteinte jusqu’à ce que les mèches se touchent, que va-t-il se passer ? La bougie éteinte éteindra-t-elle la bougie allumée ? Non. Vous êtes sûrs ?
Ou bien ce sera le contraire : la bougie éteinte sera automatiquement allumée par la bougie allumée, sans que cela ne change rien pour elle ? Notez les deux choses : quand la bougie allumée a enflammé l’autre, cela ne lui a rien retiré ! Ce n’est pas comme si l’intensité de sa lumière avait diminué de 50 %, parce qu’elle en a donné 50 % à celle qui était éteinte, non. Pourtant celle-ci s’est allumée aussi, comment est-ce possible ? Pourquoi cette règle ici ?
Ne sommes-nous pas convaincus que c’est le négatif qui prend le dessus ? Ne croyons-nous pas depuis longtemps que la négativité de ce monde nous influence et nous rend plus négatifs ? C’est pourquoi des gens s’isolent au sommet d’une montagne, aussi loin du monde que possible, pour ne plus rien avoir à faire avec nous.
Mais n’est-ce pas le contraire ? Si on est allumé, il n’y a aucune limite au nombre de bougies que l’on peut allumer, la seule limite étant le jour où vous ne serez plus allumé, lorsque ce pouvoir d’allumer d’autres bougies ne sera plus là, terminé, vous ne pouvez plus. Mais tant qu’on est allumé, peu importe le nombre de bougies qu’on allume.
Certes, il y a cet autre mot “sacrifice”, n’est-ce pas ? Mais dans l’analogie des bougies que je viens de donner, il n’y a pas de sacrifice possible ! « Oh mon Dieu, pas de sacrifice ? Cette bougie se contente d’allumer celle-là, qui, maintenant, a le même pouvoir que la première ? » Et elles peuvent en allumer, deux, quatre et même seize ! Si on poursuit l’opération sur une calculette, on arrive vite à la limite du nombre de chiffres possible.
Quand les gens se demandent comment la paix est possible, faites le calcul, c’est mathématiquement possible, mais ça dépend d’une chose : que vous soyez allumé et non éteint. Et la seule façon d’être allumé est de comprendre qui vous êtes et quelle est votre place ! Vous avez une place, vous appartenez à cette terre, non pas grâce à ce que vous faites, pas grâce à ce que vous pensez, ni à votre idéologie ni à votre philosophie. Mais vous êtes là, vous existez.
À un moment donné, quand l’univers s’est formé, pas seulement notre univers, mais tous, quand tout cela a commencé, la possibilité de la vie n’a-t-elle pas émergé en cet instant-là ? Elle l’a dû. L’oxygène n’existait peut-être pas, mais la possibilité que l’oxygène existe, si. L’hydrogène n’existait peut-être pas, mais sa possibilité existait.
Donc à partir de cet instant, les jeux, votre jeu, étaient faits.
D’accord ? Ressentez-vous ce sentiment d’appartenance ? Votre présence sur terre, en vie, est rendue possible par le même pouvoir que celui qui a placé la Lune où elle est, il n’y a pas de différence. La place du soleil, la place des étoiles dans notre univers et d’autres univers visibles, connus ou inconnus, c’est le même pouvoir, c’est la même possibilité qui vous a placé ici !
C’est le même pouvoir qui a mis les fourmis sur terre, les termites, notez que, pour chaque être humain, il existe des tonnes de termites, les termites, les brins d’herbe, le sable sur les plages, l’eau dans l’océan, les étoiles que vous voyez, qu’elles soient ou ne soient plus là, c’est exactement le même pouvoir qui a rendu votre vie possible maintenant. Vous sentez-vous en faire partie ?
Tant que ce souffle vient à vous, tant que vous êtes en vie, ce devrait être votre repère que tout va bien pour vous. Je vais être honnête aussi, il le faut ! Est-ce comme ça pour moi tout le temps ? Absolument pas ! Est-ce que certaines choses peuvent m’agacer ? Absolument.
C’est alors que je dois me rappeler que je dois faire l’effort. Je fais ça depuis 50 ans, je parle aux gens de cette possibilité, mais moi aussi je dois m’en souvenir, faire l’effort de me souvenir, que même quand les choses n’ont pas l’air d’abonder dans mon sens, le fait est que si.
Même lorsque tout est sombre, semble dénué de sens et que vous vous sentez abandonné, les bougies ont-elles inversé leurs rôles ? Non, la bougie allumée continuera d’allumer la bougie éteinte.
Comprenez votre nature, comprenez à quoi vous appartenez ! Vous êtes chez vous sur cette terre, comprenez que c’est votre place, quand vous prenez ce souffle, vous êtes à votre place, quand vous allumez la lumière en vous, vous êtes à votre place, quand vous êtes heureux, vous êtes à votre place, quand votre cœur est rempli de joie, vous êtes à votre place, quand vous êtes rempli de clarté, vous êtes à votre place. Et si tout cela vous intrigue un tant soit peu, vous n’avez pas besoin de regarder plus loin qu’en vous-même pour en trouver la source.
C’est là que nous avons besoin de ce sentiment d’appartenance, de comprendre que ce temps est précieux, qu’il ne reviendra pas, que vous êtes en vie et avez la possibilité de voir. Maintenant, vous avez le même pouvoir que celui de la bougie allumée qui peut allumer une bougie éteinte, cette transmission est possible, c’est ça le sens de la vie, c’est ça le sens de l’appartenance. Vous le reconnaissez, vous le saisissez et vous en profitez.
Brillez dans cette lumière, et vous serez surpris du nombre de bougies que vous allumerez pendant votre vie sur terre.